Analyse de flux de trésorerie : Clé pour détecter les revenus non déclarés
L’analyse des flux de trésorerie est un outil essentiel permettant aux autorités fiscales canadiennes de découvrir des revenus non déclarés, offrant aux contribuables la possibilité de contester ces résultats lorsque des divergences apparaissent dans leurs déclarations financières.
Le système fiscal au Canada et au Québec – auto-déclaration et l’autocotisation
Comme le système fiscal au Canada et au Québec est fondé sur l’auto-déclaration et l’autocotisation, il arrive que l’administration fiscale (Revenu Québec et/ou l’Agence du Revenu du Canada ci-après « RQ » et « ARC ») opère des vérifications lorsqu’une anomalie ou une incohérence apparente se manifeste dans la déclaration.
En tout état de cause, l’article 95.1 de la Loi sur l’Administration Fiscale dispose que « Le ministre n’est pas lié par une déclaration, un rapport, une demande de remboursement ou les renseignements fournis par une personne ou en son nom et il peut, malgré la déclaration, le rapport, la demande ou les renseignements ou en l’absence d’une déclaration, d’un rapport, d’une demande ou de renseignements, faire une cotisation ou déterminer un remboursement. »
Dans une telle situation…
Dans une telle situation, l’administration fiscale peut recourir à l’usage d’une méthode alternative de vérification : le mouvement de trésorerie (ou flux de trésorerie dans le langage courant).
Comme pour l’avoir net, cette méthode de vérification vise à établir une nouvelle cotisation. D’après la jurisprudence, l’agent vérificateur doit dans un premier temps utiliser des méthodes traditionnelles de vérification, et « Ce n’est que lorsqu’il constate qu’il est impossible d’effectuer une vérification directe et traditionnelle, qu’il peut utiliser une méthode alternative » (Restaurant Le Relais de Saint-Jean inc. c. Agence du revenu du Québec, 2020, au para. 62.).
Mais alors, en quoi consiste cette méthode ? Et surtout, peut-on contester un nouvel avis de cotisation calculé par cette méthode ?
I. Les mouvements de trésorerie, qu’est-ce-que c’est ?
En deux phrases, la méthode alternative (ou indirecte) de vérification des mouvements de trésorerie, flux de trésorerie, « consiste à compiler toutes les entrées et les sorties de fonds dans les comptes du contribuable au cours de la période visée.
Un écart permet à [L’Agence du Revenu du Canada, ou Ministère du revenu du Quebec ndlr] de présumer que celui-ci a omis de déclarer certains revenus. » (Boies c. Agence du Revenu du Québec, 2021, au para. 24).
Dans cette affaire, les juges ajoutent que lors d’une vérification, l’agent vérificateur n’a pas à faire une enquête pour établir la provenance des sommes. L’agent vérificateur, en application de cette méthode, se borne à analyser la documentation existante, c’est-à-dire, tout document ou information faisant état des comptes et de la gestion financière du contribuable.
Donc, cette méthode consiste à calculer les entrées et sorties de fonds, et éventuellement d’y constater un écart. L’écart constater justifiera l’émission d’une nouvelle cotisation.
Concrètement, les vérificateurs vont analyser les flux de trésorerie, c’est-à-dire les entrées et les sorties d’argent.
Prenons un exemple : un individu gagne un salaire de 100000 dollars par an, mais son comportement d’acheteur et son train de vie engendre des dépenses dépassant son salaire.
Dans un tel cas, un écart peut être constaté par l’Administration fiscale, qui s’interrogera sur l’exactitude des sommes déclarées. Mais comme pour la vérification par l’avoir net, il convient de se rappeler que cette méthode de vérification se fonde sur la présomption que tous les revenus sont imposables, ce qui n’est pas nécessairement le cas.
En effet, un héritage, un remboursement de prêt ou encore une donation peut être à l’origine de cet écart.
« doute sérieux »
Cette méthode est utilisée dans certains cas, particulièrement lorsqu’un « doute sérieux » plane sur la déclaration du contribuable. En effet, dans l’affaire Le Relais de Saint-Jean, les jugent déclarent que : « avant d’avoir recours à la méthode de vérification indirecte […], le fisc doit d’abord conclure, pour des motifs raisonnables, que les livres, registres et pièces justificatives de l’entreprise ne sont pas fiables ou que les renseignements qui y sont consignés laissent planer un doute sérieux sur leur exactitude » (Restaurant Le Relais de Saint-Jean inc. c. Agence du revenu du Québec, 2020, au para 64.
Ces « motifs raisonnables » peuvent être lorsque certaines déclarations du contribuable sont incomplètes, fausses, ou complètement absente et/ou lorsque le contribuable est incapable de fournir des explications pour justifier l’écart constaté. Mais cela peut être aussi le cas pour le particulier qui refuse de collaborer.
En ce qui concerne les entreprises
En ce qui concerne les entreprises, la décision énumère des situations pour lesquelles l’utilisation de la méthode par mouvements de trésorerie peut être utilisée. On retrouve ces quelques exemples : «Les dépôts et/ou les produits achetés sont supérieurs aux ventes déclarées pour ces mêmes produits ; inversement, les ventes de produits sont toujours supérieures à la production déclarée ; Les factures ou notes de repas, bien qu’existantes, manquent de détails : elles ne permettent pas d’identifier précisément le type d’aliments ou d’articles vendus, présentent des incohérences dans leur numérotation, n’indiquent pas ni le nom ni le numéro de taxes de l’entreprise ou encore ne sont pas datées ; Les données enregistrées par l’entreprise ne permettent pas de déterminer le mode de paiement (débit ou crédit) pour chaque vente; Les ventes indiquées sont substantiellement différentes selon les divers registres comptables.
De même, la confirmation des achats transmis par les fournisseurs identifiés ne balance pas avec les achats indiqués par l’entreprise à ses registres comptables ; La majorité des dépenses de l’entreprise sont payées comptant, ce qui empêche le fisc de procéder à une analyse exhaustive à l’aide des données bancaires ou des cartes de crédit;… » [au para. 65].
II. Peut-on contester un nouvel avis de cotisation basé sur la méthode des mouvements de trésorerie ?
Dans cette même décision, les juges soulignent qui’« il faut garder à l’esprit que l’utilisation d’une méthode alternative de vérification est en soi imparfaite et comporte sa part d’arbitraire, car il s’agit d’une solution de dernier recours utilisée par le fisc parce que les informations fournies par le contribuable ne sont pas fiables ou sont inexistantes » [au para. 61].
Cette méthode ayant une part d’arbitraire, elle n’est pas infaillible et peut souffrir d’erreur. À cet égard, il est possible d’exercer des recours pour contester la fiabilité et l’exactitude de la nouvelle cotisation établie pas l’Administration fiscale en application de la méthode de vérification par mouvements de trésorerie.
Que vous soyez particuliers ou une entreprise, si vous avez reçu une demande de vérification ou bien une nouvelle cotisation à l’issue d’une vérification par mouvements de trésorerie ou même, pour tout conseil juridique en droit fiscal, faite vous accompagner par nos avocats spécialistes en droit fiscal qui sauront vous accompagner et vous conseiller sereinement dans vos démarches.