Vices cachés : les conditions de la responsabilité fondée sur la garantie de qualité due par le vendeur

Lorsque vous vous rendez acquéreur d’un bien, le vendeur est tenu de vous en assurer la garantie de qualité ainsi que de ses accessoires.

Contactez un avocat expérimenté en matière de vices cachés si jamais vous avez des questions concernant les conditions de responsabilité basées sur la garantie de qualité du vendeur.

petite pièce en bois de la maison qui semble fragile, impliquant un vice cachéEn effet, suivants les termes de l’article 1726 du Code civil du Québec : « le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l’usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté ou n’aurait pas donné si haut prix, s’il les avait connus.

Il n’est cependant pas tenu de garantir le vice caché connu de l’acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert ».

La garantie de qualité vous permet d’intenter un recours en restitution du prix de vente, si les conditions suivantes sont réunies :

  • Le vice n’est pas apparent;
  • Le vice était antérieur à l’acte de vente;
  • Le vice rend impropre le bien à l’usage auquel on le destine ou
  • Le vice diminue tellement l’utilité du bien que l’acheteur n’aurait pas donné un si haut prix s’il les avait connus.

Outre la restitution du prix de vente, le vendeur est également tenu de réparer le préjudice subi par l’acheteur s’il le connaissait ou ne pouvait ignorer son existence.

A cet effet, l’article 1729 du Code civil du Québec pose une présomption de connaissance du vice caché par le vendeur lorsque celui-ci est un professionnel et que le mauvais fonctionnement du bien ou de sa détérioration survient prématurément par rapport à des biens identiques ou de même espèce. Cette présomption est toutefois repoussée s’il appert que le défaut est en réalité dû à une mauvaise utilisation du bien par l’acheteur.

En outre, il est à noter que suivant les termes de l’article 1733 du Code civil du Québec le vendeur ne peut exclure ni limiter sa responsabilité s’il n’a pas révélé les vices qu’il connaissait – ou ne pouvait ignorer – et qui affectent le droit de propriété ou la qualité du bien. Cette règle reçoit cependant exception lorsque l’acheteur achète à ses risques et périls d’un vendeur non professionnel.

La jurisprudence donne régulièrement des précisions sur la façon dont les dispositions législatives en matière de vices cachés doivent s’interpréter :

SSQ Société d’assurance-vie Inc. c. Succession de Piché (C.Q., 2021-12-29), 2021 QCCQ 1378, SOQUIJ AZ-51823134, 2022EXP-622

Dans une décision dite SSQ Société d’assurance-vie Inc. c. Succession de Piché (C.Q., 2021-12-29), 2021 QCCQ 1378, SOQUIJ AZ-51823134, 2022EXP-622, le juge de la Cour du Québec avait à statuer sur la question de savoir si l’auto-constructeur qui avait bâti un garage 8 ans avant la vente pouvait être tenu responsable des dommages liés à son effondrement.

Dans cette affaire, une compagnie d’assurance tentait de faire valoir un recours subrogatoire en réclamation de dommages et intérêts versés à ses assurés à la suite de l’effondrement de leur garage. Celui-ci avait été construit par le défendeur et, selon la demanderesse, sont effondrement avait été causé par un vice caché lié à sa conception et à sa construction.

La demanderesse était parvenue à démontrer que le garage était affecté d’un vice caché et que celui-ci avait entrainé la perte de son usage. Le défendeur, agissant à titre d’auto-constructeur, avait bâti ce garage 8 ans avant sa vente, en utilisant des matériaux recyclés, sans plans précis et sans avoir consulté un ingénieur, un architecte ou un entrepreneur.

Selon l’expert de la demanderesse, un ingénieur civil spécialisé en structures de bois, d’acier et de bêton, l’effondrement avait vraisemblablement été causé par un vice caché de conception ou de construction des fermes du toit. Or, la surface intérieure n’était pas encore cimentée lors de la vente : elle ne pouvait donc pas être indemnisée pour la perte d’un plancher qui n’existait pas lors de l’acquisition. En outre, le défendeur en tant qu’auto-constructeur, ne pouvait être assimilé à un vendeur professionnel de sorte que la présomption de connaissance du vice caché lui était inopposable. Dès lors, il ne pouvait être tenu, outre la restitution du prix, de réparer le préjudice subi par l’acheteur. Ceux-ci n’ont pas été condamné au paiement des dommages et intérêts.

St-Pierre c. Benoit (C.S., 2021 -12-17 (jugement rectifié le 2021-12-21)), 2021 QCCS 5491, SOQUIJ AZ-51822391, 20222 EXP-621

Dans une autre décision dite St-Pierre c. Benoit (C.S., 2021 -12-17 (jugement rectifié le 2021-12-21)), 2021 QCCS 5491, SOQUIJ AZ-51822391, 20222 EXP-621 le juge de la Cour supérieure s’est prononcé sur une demande en annulation d’une vente d’immeuble ainsi qu’en réclamation de dommages-intérêts et dommages moraux.

En l’espèce, les demandeurs avaient acheté du défendeur une résidence que ce dernier avait fait construire en 1993. Lors des négociations précontractuelles, une clause mentionnant que l’achat était fait aux « risques et périls » de l’acheteur avait été ajoutée par le défendeur.

Outre une fissure de tassement normale dans le solage, l’inspecteur préachat n’avait remarqué aucun problème particulier : pas de signe d’affaissement ni fissure dans les murs et plafonds. Or, à compter de 2017, les demandeurs constatent que la maison s’enfonce. Ils remarquent des fissures sur le parement de brique et que le plancher du sous-sol, qui avait été nivelé par le défendeur, est descendu de quelques centimètres.

Un expert conclu que l’immeuble avait été construit sur du remblai et que des travaux d’enfoncement du pieux devaient être exécutés. Les demandeurs réclamaient donc l’annulation de la vente et dommages-intérêts au titre des dépenses effectuées pour l’immeuble et des inconvénients subis.

Le juge a ici conclu que la cause du vice caché qui touchait l’immeuble, soit l’affaissement de la dalle, était liée au mauvais remblayage et à la présence de matériaux inadéquats ainsi qu’à une absence de compaction. Il s’agissait d’un vice grave, inconnu des demandeurs, datant de la construction. Le défendeur, agissant à titre de maître d’œuvre lors de la construction de sa résidence, devait ici être assimilé à un fabricant au sens de l’article 1730 du Code civil du Québec. Non seulement celui-ci avait supervisé le remblayage, participé aux travaux et décidé de ne pas effectuer de test de compaction, mais aussi avait-il constaté le phénomène d’affaissement lors de travaux de réparation des fissures et tenté de le camoufler aux acheteurs lors de la vente.

Le juge a estimé que le défendeur n’avait pas ici respecté les exigences de bonne foi et avait employé des manœuvres dolosives en s’abstenant fautivement de révéler des faits importants, ceci ayant pour conséquence de vicier le contrat. La clause prévoyant que la vente était effectuée aux risques et périls de l’acheteur était donc inapplicable. En conséquence et vu l’importance du vice caché, les demandeurs étaient en droit d’obtenir l’annulation de la vente ainsi que l’octroi de dommages-intérêts.

Rodgers c. Gaudet (C.A., 2022-02-16), 2022 QCCA, 232, SOQUIJ AZ-51830714, 2022EXP-611

Enfin, dans un arrêt dit Rodgers c. Gaudet (C.A., 2022-02-16), 2022 QCCA, 232, SOQUIJ AZ-51830714, 2022EXP-611 les juges de la Cour d’appel du Québec avait à se prononcer sur la décision du juge de première instance qui avait ordonné la restitution du prix de vente de l’immeuble en cause par les vendeurs ainsi que le paiement par la notaire appelante de dommages-intérêts équivalent à ce prix.

Dans cette affaires, le juge de première instance avait conclu que les vendeurs intimés avaient commis un dol en n’informant pas les acheteurs intimés que leur immeuble était situé dans une zone à risque de glissement de terrain et qu’un glissement de terrain était survenu dans le boisé à l’arrière de la propriété 3 an auparavant. Il avait aussi déterminé que la notaire appelante avait commis une faute professionnelle en ne vérifiant pas la teneur du règlement municipal mentionné dans le certificat de localisation qui lui avait été transmis et en n’informant pas, par conséquent, ses clients acheteurs que la propriété qu’ils s’apprêtaient à acquérir était située dans cette zone.

Les juges de la Cour d’appel a accueilli l’appel en énonçant que le fondement juridique de la responsabilité de la notaire – soit sa faute professionnelle – et le préjudice ainsi causé aux acheteurs était substantiellement différent de celui de la responsabilité fondée sur la garantie de qualité des vendeurs.

En effet, ceux-ci avaient commis un dol et provoqué l’erreur des acheteurs, viciant ainsi leur consentement au sens de l’article 1400 alinéa 2 du Code civil du Québec. Il en résulte que seuls les vendeurs ont été tenus responsables, et le notaire exonéré.

En conclusion

En conséquence, la vigilance est de mise en matière de vices cachés et l’importance des faits et circonstances est capitale : si la garantie légale vous est due par le vendeur lorsque vous vous portez acquéreur d’un bien, encore faut-il que les conditions de cette responsabilité soient, en tout état de cause, strictement réunies.

REMARQUE : Cet article ne constitue pas un conseil juridique ou un avis juridique. Il sert uniquement à informer les lecteurs de certains aspects des lois entourant les vices cachés au Québec.