De façon générale, une injonction est une décision judiciaire qui ordonne à une personne physique ou morale (c’est-à-dire une société) de faire, de ne pas faire ou de cesser quelque chose. Cette définition paraît simple, mais elle recouvre en réalité une notion juridique complexe, qui joue un rôle essentiel dans la protection des droits. Concrètement, une injonction est un outil que le droit met à la disposition d’une personne qui souhaite empêcher un préjudice ou obliger une autre personne à agir.
Mais qu’est-ce que cela signifie réellement, et dans quelles situations peut-on obtenir une injonction ? Pour répondre à cette question, il faut comprendre sa définition, ses différents types, les critères que le tribunal applique et ses limites.
Qu’est-ce qu’une injonction ?
L’injonction est une ordonnance rendue par la Cour supérieure du Québec. Elle s’adresse à une personne, à une entreprise ou à une organisation et oblige son ou ses représentants à :
- ne pas faire quelque chose,
- cesser une activité, ou
- accomplir un ou des actes déterminés.
En d’autres termes, il s’agit d’un ordre légal contraignant, délivré par un juge, et dont le non-respect peut mener à des sanctions sévères. L’injonction est donc un recours puissant qui permet de protéger des droits, de prévenir des préjudices et de faire respecter la loi dans des situations où d’autres moyens pourraient s’avérer insuffisants ou inefficaces.
Les différents types injonctions
Il existe plusieurs formes d’injonctions. Elles varient selon le moment où elles sont demandées, leur durée et leur objectif.
Injonction provisoire :
- Une injonction provisoire est une mesure immédiate, d’une durée très courte (maximum 10 jours sans le consentement des parties), qui peut être ordonnée à quelqu’un même en son absence.
- Elle est utilisée en cas d’urgence, parfois avant même que la partie adverse ne soit informée.
- Son rôle est de protéger rapidement les droits.
- Exemple : interdire temporairement la diffusion de documents confidentiels ou ordonner l’arrêt de la démolition d’un immeuble patrimonial.
Injonction interlocutoire :
- Une injonction interlocutoire est temporaire et accordée pendant le déroulement d’une instance judiciaire.
- Son but est de protéger les droits d’une partie jusqu’au jugement final, en empêchant la survenance d’un préjudice sérieux et irréparable.
- Exemple : empêcher la démolition d’un immeuble le temps que le tribunal tranche sur la légalité des travaux.
Injonction permanente :
- Une injonction permanente est rendue à la fin du procès, elle a un effet durable et définitif.
- Elle ordonne à une personne ou une entité d’agir ou de s’abstenir de façon continue.
- Exemple : interdire définitivement à une entreprise de polluer un cours d’eau.
Injonction prohibitive ou restrictive :
- Une injonction prohibitive ou restrictive empêche une personne de poser un geste déterminé.
- Exemple : interdire à un ancien employé de solliciter la clientèle de son ancien employeur.
Injonction mandatoire :
- Une injonction mandatoire oblige au contraire à accomplir une action précise.
- Exemple : ordonner à une personne de quitter les lieux loués, de remettre un bien ou de respecter une obligation contractuelle.
L’injonction interlocutoire et ses critères
L’injonction interlocutoire est sans doute la plus courante. L’injection interlocutoire vise à protéger temporairement les droits d’une partie dans l’attente de la décision finale. Le tribunal ne l’accorde pas automatiquement, le demandeur doit convaincre le juge en satisfaisant quatre critères bien établis.
Les quatre critères à remplir pour obtenir une injonction interlocutoire :
Apparence de droit suffisante :
- Le demandeur doit démontrer qu’il dispose d’un droit qui semble légitime.
- Il ne s’agit pas de prouver définitivement son droit (cela relève du procès au fond), mais plutôt de montrer que la cause soulève une question sérieuse qui mérite d’être tranchée.
Préjudice sérieux ou irréparable :
- Le demandeur doit convaincre le tribunal qu’un dommage grave et irréparable risque de se produire si l’ordonnance souhaitée n’est pas émise, ce qui rendrait le jugement final inutile, et qu’aucun autre recours ne permettrait d’éviter un tel préjudice.
- Exemple : la destruction d’un bâtiment patrimonial ou la perte d’un secret commercial.
Urgence :
- L’injonction doit être nécessaire immédiatement.
- Si le tribunal estime que le demandeur pouvait attendre la décision finale sans subir de dommage irréparable, il refusera l’injonction.
Balance des inconvénients :
- Le juge évalue les avantages et les inconvénients de l’injonction pour chacune des parties.
- Si celle-ci cause plus de tort qu’elle n’en prévient, elle ne sera pas accordée.
Parfois, le juge peut assortir l’injonction d’un dépôt de garantie, afin de couvrir les frais ou les dommages qui peuvent en découler.
À quel moment peut-on demander une injonction ?
Une injonction interlocutoire peut être demandée à tout moment au cours d’une instance, ou même avant le dépôt officiel de la demande introductive si celle-ci ne peut être déposée à temps. Dans ce cas, la demande doit être signifiée à l’autre partie avec un avis de présentation.
En situation urgente, une injonction provisoire peut être accordée immédiatement, avant même que la partie adverse n’ait été invitée, donc en son absence. Toutefois, elle a une durée de maximum de 10. Cette règle garantit un équilibre entre la protection rapide des droits et le respect des droits de la partie adverse.
Souvent, l’injonction provisoire sert de mesure temporaire en attendant une injonction interlocutoire plus durable. Après le jugement, le tribunal peut décider de la rendre permanente.
Bref, l’injonction provisoire n’est pas toujours nécessaire, elle est utilisée seulement lorsque l’urgence empêche d’attendre le processus normal de l’injonction interlocutoire, qui nécessite un avis de présentation et la signification à l’autre partie avant d’entrer en vigueur. L’injonction provisoire, elle, peut être mise en vigueur immédiatement.
Enfin, si le tribunal conclut que les droits méritent une protection durable, il peut rendre une injonction permanente dans son jugement final.
Quelques règles particulières
- Le pouvoir du tribunal
Tut d’abord, le juge peut suspendre ou renouveler une injonction en fonction de l’évolution du dossier.
- Les limites d’une injonction
Il est interdit d’utiliser une injonction pour bloquer une autre procédure judiciaire ou empêcher une personne d’exercer ses fonctions au sein d’une entreprise, d’une institution publique ou d’une organisation, sauf exceptions prévues par la loi.
- En cas d’appel ?
Ensuite, l’injonction demeure en vigueur même lorsqu’un jugement final a été rendu, si la cause est portée en appel. Toutefois, le juge de la Cour d’appel peut suspendre temporairement l’injonction.
- Les conséquences en cas de non-respect d’une injonction
Finalement, le non-respect d’une injonction peut constituer un outrage au tribunal. Dans ce cas, le juge peut également ordonner l’annulation ou le retrait de tout acte accompli en violation de l’ordonnance. L’outrage au tribunal peut entraîner une peine d’emprisonnement, des travaux communautaires ou le paiement d’amendes.
En résumé
L’injonction est un recours judiciaire puissant et souple prévu par le Code de procédure civile du Québec. Elle vise à protéger efficacement des droits lorsqu’un simple recours en dommages-intérêts serait insuffisant.
Qu’elle soit provisoire, interlocutoire ou permanente, elle permet d’agir vite et de prévenir des situations qui pourraient causer un préjudice irréversible. Cependant, son obtention est encadrée par des critères stricts : une apparence de droit sérieuse, l’existence d’un préjudice grave, l’urgence et une balance des inconvénients favorable.
L’injonction reste un outil exceptionnel, utilisé lorsqu’aucune autre mesure ne permet de sauvegarder les droits. Le juge conserve toujours le dernier mot, et le non-respect d’une injonction peut entraîner des sanctions sévères pour outrage au tribunal.
Si vous avez besoin d’aide pour obtenir une injonction, contactez-nous dès maintenant.
REMARQUE : Cet article ne constitue pas un avis juridique. Il est fourni à titre informatif seulement afin d’aider les lecteurs à mieux comprendre certains aspects liés aux injonctions au Québec. Chaque situation étant unique, nous recommandons de consulter un avocat ou un professionnel du droit pour une évaluation personnalisée de votre dossier.