Que faire lorsque l’on a un voisin bruyant ou dérangeant ?

Vivre une situation de trouble de voisinage peut rapidement rendre le quotidien impossible et très difficile à vivre. Vous avez un voisin bruyant et vous vous interrogez sur les recours dont vous disposez pour faire cesser le bruit? N’hésitez pas à contacter notre cabinet afin de parler à un spécialiste en droit civil.

I. C’est quoi un trouble du voisinage ?

Un trouble du voisinage, se caractérise par son caractère anormal et déraisonnable. Le trouble peut résulter de la présence d’odeurs, de comportements voyeuristes ou exhibitionnistes, ou autres troubles comme la saleté, des cris d’animaux et plus généralement, de bruit, etc… C’est ce dernier cas de figure qui va nous intéresser.

Cependant de façon générale les recours préconisés dans ce blog peuvent s’adapter à d’autre troubles de voisinage.
Si ultimement, l’évaluation du caractère anormal de l’inconvénient subi est une question de fait relevant du pouvoir discrétionnaire du juge de première instance, quelques éléments peuvent toutefois nous aider à avoir une idée de ce qu’est un trouble du voisinage.

Tout d’abord, puisque l’anormalité des inconvénients implique une certaine gravité et récurrence, elle doit s’apprécier globalement. Il s’agit d’un exercice d’équilibre entre les droits de propriété de chacun.

Ensuite, pour déterminer si les inconvénients subis sont anormaux, il faut tenir compte de la gravité des troubles, du caractère des lieux, de la légalité de l’activité, de l’occupation antérieure, du bien-être de la collectivité et de la conduite du voisin défendeur.

Puis, le critère de la récurrence doit être considéré en premier. C’est-à-dire qu’il faut que ce trouble survienne assez souvent et régulièrement, et si c’est le cas et que le critère est retenu, l’examen de la gravité du trouble peut alors être entrepris. Deux étapes sont nécessaires.

D’abord, l’analyse du voisinage lors de laquelle il convient de bien définir l’environnement local en considérant plusieurs éléments liés au temps et au lieu. Ensuite, une fois le voisinage défini, le seuil de gravité doit être évalué et il convient alors de déterminer si les inconvénients subis sont excessifs. Si le trouble en question est à la fois récurrent et grave, il y a lieu de conclure qu’il dépasse le seuil de normalité.

La récurrence s’entend généralement du caractère continu et répétitif du trouble s’étalant sur une durée assez longue, alors que la gravité renvoie à l’idée d’un préjudice réel et sérieux en regard de la nature et de la situation de la maison ou de l’immeuble du fonds, des usages locaux et du moment des inconvénients.

Enfin, il incombe à celui qui invoque l’abus de droit pour nuisances et qui désire faire cesser les inconvénients qu’il prétend anormaux de démontrer le caractère anormal et exorbitant desdits inconvénients, lesquels doivent dépasser le seuil de la tolérance d’une personne raisonnable (Chainey c. Fortin, 2014 QCCS 3378, par. 27 et 38).

II. La gradation des recours : des étapes à respecter et à ne pas dépasser

L’une des premières choses à faire en cas de trouble bruyant du voisinage, est de communiquer avec son ou ses voisins. En effet, avant d’entreprendre tout acte à l`égard du trouble perçu, il est nécessaire dans un premier temps d’adresser le problème à son voisin et de tenter, dans la mesure du possible, de trouver une solution convenable à tout le monde.

Si les discussions avec votre voisin bruyant ou dérangeant n’aboutissent pas à la résolution du problème, vous pouvez alors rédiger et envoyer une lettre de mise en demeure demandant explicitement à votre voisin de cesser le trouble.

Si le trouble persiste, il est alors préférable de contacter les autorités de police, afin d’y déposer une plainte. Il est possible de déposer plusieurs plaintes si le problème se poursuit et cela, afin de démontrer le caractère récurrent du trouble. Au moment du dépôt de la plainte, il est essentiel de se limiter à décrire et expliquer d’une part la nature du bruit, et d’autre part le préjudice que l’on estime vivre. Cela signifie que le contenu de la plainte ne doit porter que sur le bruit (des éléments descriptifs du bruit, par exemple, provenance, récurrence, intensité etc., mais aussi d’éléments descriptifs du préjudice) et non sur l’attitude ou le comportement hypothétique ou réel du voisin à l’origine du bruit.

Car en effet, la plainte déposée auprès des autorités de police ne saurait comporter des déclarations qui pourraient porter atteinte à l’honneur ou encore à la réputation du voisin bruyant. De telles déclarations pourraient être considérées comme du harcèlement entre voisins (Terrana c. Piunno, 2014 QCCS 3295 [83] et [84]¬). Précisons que le harcèlement représente une forme particulière de l’abus de droit, de la violation de l’obligation générale d’agir de bonne foi édictée aux articles 6 et 7 C.c.Q. (Langlais c. Skulska, 2010 QCCQ 10271 [138]). Il est donc fondamental d’être vigilant à ses déclarations, malgré les difficultés et la charge émotionnelle qu’une situation de trouble du voisinage peut occasionner.

Dans cet ordre d’idée, et pour éviter qu’une situation déjà pénible s’envenime au point de devenir conflictuelle, la multiplication excessive de plaintes et/ou la diffusion de propos humiliants, dégradants et diffamatoires à l’égard d’un voisin est un comportement à proscrire. Dans le cas où le voisin bruyant serait une entreprise, la publication sur internet de propos diffamatoires et/ou mensongers à l’encontre d’une entreprise pourrait être entendu comme une atteinte à la réputation de ce voisin et peut donc engendrer des dommages-intérêts et des dommages punitifs (J.M. Poirier Excavation et Mini inc. c.

Dupuis, 2023 QCCQ 4184). Y compris si de tels propos sont tenus sur des réseaux sociaux, dans quel cas une injonction permanente de s’abstenir de tenir de tels propos et une ordonnance de publier un message de rétractation sur les réseaux sociaux utilisés peuvent être prononcées (9329-6481 Québec inc. c. Ouimet, 2020 QCCS 3472). En effet, comme l’énonce la Cour supérieure dans St Paul-d’Abbotsford (Municipalité de) : « [85] Le droit à la liberté d’expression n’est pas illimité. Il doit être exercé dans le respect du droit à la dignité, à l’honneur et à la réputation. ».

III. En conclusion

Vivre une situation de trouble du voisinage peut rapidement devenir envahissant et constituer une véritable source de stress, surtout si la nuisance est récurrente et que les dépôts de plainte ne sont pas suivis d’effets. Dans un tel cas, ne restez pas seul et n’agissez pas seul ! Consulter un avocat afin de bénéficier d’un avis juridique et le cas échéant, d’une aide juridique, et qui vous accompagnera sereinement dans vos démarches.

REMARQUE : Cet article ne constitue pas un avis juridique ou une opinion juridique. Il vise uniquement à informer les lecteurs de certains aspects des lois entourant la protection des adultes vulnérables dans la province de Québec.